Comment choisir une pédagogie ?

Il est bon de choisir une pédagogie qui va aider l’enfant à utiliser en priorité le mode de fonctionnement qui lui est le plus naturel ET également qui va l’aider à développer les autres modes de fonctionnement.

Ces textes ont été écrits par Catherine Chemin, ancienne membre de CISE. Ils enrichissent désormais le site de LAIA en incitant à la réflexion.

Introduction

Chacun de nous a des fonctionnements qui sont naturels et innés, et chacun de nous peut acquérir d’autres fonctionnement qui ne sont pas naturels. Par exemple, on peut apprendre à se créer des images mentales. Mais il y a des fonctionnements qui ne peuvent s’acquérir ! Par exemple, la pensée en arborescence ne peut pas s’acquérir ! On l’a dès la naissance ou on ne l’a pas. La pensée en images qui permet de visionner en 3D est également un fonctionnement inné, on naît avec. Cette pensée en images n’est pas la même chose que les images mentales que l’on peut apprendre à se créer. Contrairement à la pensée en images qui bouge comme dans un film, les images mentales sont des images fixes.

Avant de choisir une pédagogie, il peut être utile de chercher comment fonctionne notre enfant, car il y a des chances qu’il ne fonctionne pas comme nous ! En effet, beaucoup de différences ont été observées au sein d’une même famille. Inutile donc de choisir une pédagogie en fonction uniquement de nos critères, nos facilités, notre vécu, il faut aussi prendre en compte les besoins spécifiques de notre enfant. Nous avons vu les conséquences qu’engendrent des pédagogies qui ne correspondent pas au fonctionnement de l’enfant, et comment un enfant peut être perturbé et même voir sa construction fortement entravée avec des pédagogies inadaptées.

Il est bon de choisir une pédagogie qui va aider mon enfant à utiliser en priorité le mode de fonctionnement qui lui est le plus naturel ET également qui va l’aider à développer les autres modes de fonctionnement.

Formel ou informel ?

Pour choisir une pédagogie, il semble utile aussi de discerner comment nous voulons travailler. D’ailleurs, c’est souvent la première question que se posent les parents lorsqu’ils ont décidé d’instruire à la maison : quel type de fonctionnement adopter ? formel ou informel ? peut-être les deux ? suivre les programmes scolaires ? suivre les envies de l’enfant ?… C’est aussi un sujet de questionnement pour toute famille IEF dès qu’elle remet en question ses procédés, c’est-à-dire… souvent et régulièrement : est-ce que je ne fais pas trop de formel ? Est- ce que j’en fais suffisamment ? Est-ce que je ne devrais pas faire que du formel ? Et si je faisais de l’informel… un peu ? Serait-il bon pour mon enfant de faire que de l’informel ? Est-ce que ce mode de fonctionnement lui conviendrait ? Puis-je vraiment avoir confiance en lui pour ce choix ? Dans quelle limite puis-je laisser mon enfant faire ses expériences ?…

Même s’il est souvent difficile de se détourner des programmes scolaires, de faire confiance en son enfant, il faut savoir que différentes études ont démontrés que formel et informel étaient utiles. Frédéric Domon, président de Socialearning, fondateur d’Entreprise Collaborative, explique dans un article paru sur Le monde.fr que les entreprises se posent aussi ce genre de questions.

D’après Frédéric Domon, le développement de notre société bouleverse les modes d’apprentissages en formation professionnelle qu’il serait bon de revoir… La majorité des professionnels de la formation aimeraient voir disparaître les formations formelles au profit de formations informelles, mais ils s’inquiètent… « cet univers ressemble à un immense chaos : pas de pédagogie, aucune règle d’or sur la façon de gérer cet univers ou sur la façon de valider les acquis. D’où un attentisme prudent de leur part… ». Ce questionnement vous rappelle-t-il quelque chose ?

Frédéric Domon cite John Seely Brown : « le vrai génie des organisations est de savoir gérer l’informel, le non prévu, souvent inspiré des façons dont les individus gèrent leurs problèmes d’une manière que les processus formels ne peuvent anticiper ». Il cite également quelques américains qui ont démontré que 90% de nos savoirs proviennent de l’apprentissage informel qui reste majoritairement lié à des expériences concrètes. En effet, lorsque la formation est séparée du travail elle conduit principalement aux oubliettes. Ce qui se retient le mieux prend appui sur du concret, des essais, des échecs…donc en faisant, en réalisant… comme pour apprendre à faire du vélo, quoi ! Il serait donc plus judicieux de favoriser l’apprentissage par l’expérience et par l’interaction pour apprendre à faire face et résoudre des problèmes, proposer un « apprentissage permanent qui nécessite une ouverture à de nouvelles situations, une interaction profonde avec les autres ».

Ces mêmes américains ont développé le modèle 70/20/10 qui définit comment s’effectue le développement des compétences et l’acquisition des connaissances :

  • 70% par l’activité et l’expérience
  • 20% par les contacts, les interactions avec les autres
  • 10% par de la formation formelle au sens propre, que ce soit en classe, en atelier…

Ces modes de fonctionnement devraient-ils avoir l’apanage des entreprises ? Puisque l’instruction est là pour aider les enfants à se préparer pour l’avenir, à vivre dans la société, pourrions-nous adopter un tel rythme ?

Il semble que pour beaucoup, cela ne soit pas facile même s’ils partagent ce principe. L’extérieur, la famille, le regard des autres… constituent une pression difficile à évacuer parfois. Il y a aussi la peur de faire différemment et de peut-être fermer des portes pour d’éventuelles études… Cependant, certaines familles arrivent à privilégier largement l’informel, d’autres restent assez scolaires pour les mathématiques et le français et proposent de l’informel pour les autres matières., d’autres encore proposent du formel pour toutes les matières. A chacun de voir !

Quelle est l’origine de chaque pédagogie ?

Il semble utile également de s’intéresser à l’origine de chaque pédagogie, de se demander sur quoi reposent les affirmations pédagogiques du pédagogue, bref, de se poser quelques questions : qu’elle est la formation du pédagogue ? La pédagogie est-elle simplement une idéologie jamais mise en pratique ? Est-elle basée sur quelques observations qui ont donné lieu à des généralisations et présentées comme possibles pour tous ? Est-elle basée sur des observations qui ont fait l’objet de recherches approfondies qui permettent réellement la généralisation de certains faits ? Et bien sûr : est-elle susceptible de convenir à mon enfant ? A son mode de fonctionnement ? Va-t-elle lui permettre de développer certains aspects cognitifs qui ne lui sont pas naturels ?

La théorie doit être liée à l’expérience et l’observation sous peine de sombrer dans l’utopie. Citons quelques exemples (ordre chronologique) : Jean-Jacques Rousseau est reconnu comme un pédagogue mais c’est un pédagogue idéologue sans aucune expérience concrète, il a même abandonné ses enfants. Pestalozzi n’a pas pu mettre en pratique toutes ses idées et a connu des échecs mais il a connu de grandes réussites, avec des enfants de conditions bien différentes, où la mutualité avait un rôle important. Maria Montessori, médecin, a créé sa pédagogie en observant des enfants en situation d’apprentissage et a confirmé ses observations, notamment les périodes sensibles et le besoin de tout relier au concret, de donner du sens, et ce avec des enfants de différentes cultures du monde entier. Elle a aussi pu observer que son matériel convenait à tous les enfants, à tous les modes de fonctionnement et permettait à chacun d’avancer à son rythme car cette pédagogie complète offre suffisamment de liberté pour que chacun puisse découvrir par lui-même tout en étant suffisamment structurée pour guider l’enfant.

 

Charlotte Mason

Rudolf Steiner

Apprentissages autonomes

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